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Samba Diawara, le discret qui n’a jamais demandé la lumière
Pour le vingt-deuxième match de sa carrière sur un banc professionnel, Samba Diawara se retrouve à coacher en finale de la Coupe de France. L’occasion d’entrer dans l’histoire du Stade de Reims en cas d’exploit face au PSG. Un plan qu’il n’avait pas franchement imaginé.

« Sambinho ! » Dans le hall de la Gaillette, centre d’entraînement du RC Lens, alors qu’il n’avait pas encore quitté le club sang et or, Will Still accepte volontiers d’évoquer Samba Diawara, un de ses adjoints au Stade de Reims, qu’il a également connu en Belgique. « Arriver en finale de la Coupe de France, c’est grandiose pour lui, applaudit Still. Surtout au vu de la saison compliquée qu’ils ont dû gérer. Mais j’espère de tout cœur qu’ils parviendront à se maintenir. Il n’y a pas un être humain avec un meilleur fond que Samba dans le monde du foot. »
Aujourd’hui, il vous dira que son choix n’était pas d’être numéro 1.
Tout doit se bousculer dans le cerveau de l’entraîneur du Stade de Reims. Intronisé le 3 février après le renvoi de Luka Elsner, le coach malien n’a pas franchement réussi à inverser la dynamique rémoise en championnat. Au point de disputer le barrage pour se maintenir face au FC Metz (nul 1-1 à l’aller mercredi en Lorraine ; match retour jeudi prochain au stade Delaune). Mais aussi, dans le même temps, trois tours passés en Coupe de France (Bourgoin, Angers, Cannes), et une première finale depuis 1977 pour les Rouge et Blanc. Quoi qu’il arrive dans cette fin de saison sous tension côté rémois, Diawara restera l’entraîneur qui a emmené le SDR au Stade de France, rêve ultime de son président Jean-Pierre Caillot depuis qu’il est à la tête du club (2004).
« Je lui lançais qu’il serait entraîneur en Ligue 1 et un jour sélectionneur »
Mais un constat clair : voir Samba Diawara, 47 ans, entraîneur numéro 1 d’une équipe de Ligue 1, c’est une surprise pour beaucoup. « Qu’il le soit par rapport à son contenu, son charisme, ce qu’il peut apporter, ça ne m’étonne pas, replace Felice Mazzu, qui l’a eu dans son staff à Charleroi. Mais quand on parlait ensemble, il me disait : “Je resterai assez longtemps adjoint, je ne me vois pas numéro un.” » Connu également à Charleroi, Philippe Simonin appuie : « Ce n’était pas quelqu’un qui était dévoré par l’ambition. Dans une carrière, on croise des gens dont on peut se dire : “Lui, il va tout faire pour arriver en haut.” Samba, ça s’est fait naturellement. Je pense que le milieu a repéré ses qualités technico-tactiques et humaines. Il a été porté par la vague, mais ce n’est le genre à savonner la planche. »
🗣️ | Samba Diawara : « Je ne pourrais pas me regarder dans une glace si je disais à mes joueurs de ne pas disputer cette Coupe de France ! » 👀🔥 #FCMSDR pic.twitter.com/SSxi5oNjPq
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Ancien entraîneur de Charleroi, Karim Belhocine confirme que son ancien assistant était très heureux dans ce rôle de l’ombre, « mais c’est de l’humilité, pense-t-il. Je lui disais qu’il serait numéro 1, en lui expliquant “Tu es meilleur que nous, pourquoi tu ne serais pas plus haut que nous ?” Je lui lançais qu’il serait entraîneur en Ligue 1 et un jour sélectionneur. » Will Still loue son pragmatisme face à l’urgence : « Aujourd’hui, il vous dira que son choix n’était pas d’être numéro 1. Mais il a compris la nécessité du club, et il le fait de façon hyper professionnelle. » Ancien défenseur central en France (Red Star, Troyes, Istres, Louhans-Cuiseaux) et en Belgique (Tubize, Charleroi, Union saint-gilloise), Diawara s’est très vite pris de passion pour le coaching, avec un accent prononcé pour la formation. « Il était extraordinaire dans ce domaine, confirme Felice Mazzu. Il était un acharné. »
Il ne casse pas, il ne ment pas, il ne triche pas. Sa priorité, c’est d’être honnête avec les gens qui l’entourent. Il a cette intelligence émotionnelle qui fait qu’il n’est jamais maladroit.
« Avec son côté formateur, enchaîne Belhocine, il se plaisait à faire progresser les jeunes. » L’ex-international malien a petit à petit toqué à la porte des équipes A à Charleroi ou Anderlecht, mais toujours à l’abri des regards. « Travailler avec lui au quotidien est d’une simplicité incroyable, loue Still. Il est très humble, il va toujours essayer de t’aider, peu importe s’il n’est pas d’accord avec toi. » « Sa plus grande force, c’est sa loyauté, pense Philippe Simonin. Il ne rechigne pas à la tâche, il bosse, il aime ça. » Ancien préparateur physique du Stade de Reims, qui exerce toujours en Belgique aujourd’hui, Simonin évoque encore « quelqu’un de vraiment très compétent. C’est un passionné de football ! Je me rappelle qu’il s’intéressait par exemple au travail du RB Leipzig. Il étudiait beaucoup les choses avec une grande curiosité, en se faisant un background très important. »
Samba, joue-la comme De Zerbi
En acceptant de diriger le Stade de Reims sur la durée (il avait fait un premier court intérim en fin de saison 2023-2024 après le départ de Will Still), Samba Diawara avait donc plusieurs cordes à son arc. « Il a une approche du football très intéressante, note Mario Notaro, qui l’a vu émerger à Charleroi. Une approche très réaliste. Quand on parle de football avec lui, on a l’impression que tout semble logique. » Mais c’est aussi hors terrain que la différence peut se faire sentir chez Diawara. « Dans la gestion de groupe, il a de grandes qualités, il comprend les différentes générations, promet Karim Belhocine. Il ne casse pas, il ne ment pas, il ne triche pas. Sa priorité, c’est d’être honnête avec les gens qui l’entourent. Et tu ne vas jamais te fâcher avec lui, car il sait quoi dire, quand le dire et quand il ne faut rien dire. Il a cette intelligence émotionnelle qui fait qu’il n’est jamais maladroit. » Et de faire un constat simple : « Il n’y a pas un endroit d’où il est parti où les gens voulaient qu’il parte. »
Et après ? Au soir du barrage retour face au FC Metz, et peu importent les résultats obtenus en Coupe de France ou pour le maintien, quel sera l’avenir de Diawara ? Un numéro 1 sur la durée, à Reims ou ailleurs ? Ou un retour dans l’ombre qu’il apprécie tant ? « Je me montre sous un autre jour et je vais l’assumer, affirmait-il à L’Équipe. Je me dis que je change de plan de carrière. Jusqu’ici, j’avais toujours eu en tête d’essayer d’être le meilleur adjoint possible, maintenant je suis déterminé en tant que coach. » Avec son activité de trading, et de profil de club qui lance des jeunes à fort potentiel pour les revendre ensuite, le Stade de Reims a tout du terrain de jeu idéal pour Diawara, au club depuis trois ans maintenant.
Still, qui salue « les principes de vie et les valeurs très fortes » de son ancien adjoint, conclut : « Le foot que joue Reims n’est, pour l’instant, pas celui de Samba Diawara. » Karim Belhocine en salive d’avance : « Si Reims a la bonne idée de lui laisser la tête, il va poser des principes de jeu, ça va jouer au ballon, presser haut. Il aimait bien Roberto De Zerbi et d’autres. Il a étudié le football. » « Je crois qu’on n’a pas encore vu de quoi il est capable, observe Philippe Simonin. J’ai hâte qu’il nous montre tout ce qu’il a en lui. »
Les notes de la finale de la Coupe de FrancePar Timothé Crépin